Comprendre le cancer de l'endomètre : facteurs de risque, traitements et avancées récentes. a71

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Aux États-Unis, l’incidence du cancer de l’endomètre est en hausse, l’obésité constituant le principal facteur de risque et étant impliquée dans 57 % des cas. Les femmes noires sont particulièrement touchées par des disparités inquiétantes : leur incidence annuelle augmente de 2,3 %, contre seulement 0,3 % chez les femmes blanches, et leur mortalité reste plus élevée, même après ajustement selon le stade de la maladie. Les nouvelles techniques chirurgicales mini-invasives et la cartographie du ganglion sentinelle ont permis de réduire les complications. Parallèlement, les avancées en biologie moléculaire ont identifié quatre sous-types distincts de ce cancer, ouvrant la voie à des traitements ciblés, y compris pour les cas de récidive.

Comprendre le cancer de l’endomètre : facteurs de risque, traitements et avancées récentes

Table des matières

Introduction : l’importance du cancer de l’endomètre

Le cancer de l’endomètre, qui se développe dans la muqueuse utérine, constitue un problème de santé croissant aux États-Unis. Contrairement à la plupart des autres cancers, son incidence et sa mortalité sont en augmentation. Cette tendance est étroitement liée à l’épidémie d’obésité, l’excès de poids étant l’un des facteurs de risque les plus significatifs.

Ces dernières années, les approches thérapeutiques ont considérablement évolué. Les chirurgiens utilisent désormais des techniques avancées, comme la cartographie des ganglions sentinelles et l’ablation mini-invasive de l’utérus, des trompes et des ovaires. Les recherches du projet Cancer Genome Atlas (TCGA) ont mis en lumière la complexité biologique de ce cancer, ouvrant la voie à des traitements plus personnalisés.

Malgré ces progrès, des disparités persistent. Les femmes noires présentent des taux plus élevés de sous-types agressifs et un pronostic moins favorable, même à des stades similaires. Face à la progression de l’obésité, de nouvelles stratégies de prévention et de traitement sont urgemment nécessaires.

Épidémiologie et facteurs de risque

Le cancer de l’endomètre est fortement associé à plusieurs facteurs de risque modifiables. L’obésité et les troubles métaboliques comme le diabète ou le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) augmentent significativement le risque. De même, une exposition excessive aux œstrogènes—due à des tumeurs sécrétantes ou à un traitement hormonal non contrebalancé—prédispose à cette maladie.

Des études ont quantifié ces risques :

  • Le tamoxifène double approximativement le risque de cancers endométrioïdes et non endométrioïdes
  • Une utilisation prolongée (plus de 5 ans) multiplie le risque par quatre
  • Les femmes avec un IMC normal ont un risque à vie de 3 %
  • Chaque augmentation de 5 unités d’IMC élève le risque de plus de 50 %

Parmi les facteurs protecteurs, la multiparité réduit le risque, de même que la contraception orale (baisse de 30 à 40 %), avec une protection durable après l’arrêt.

L’âge moyen au diagnostic est de 63 ans, mais on observe une augmentation des cas chez les femmes de moins de 50 ans. Cette tendance complique la prise en charge, notamment pour les jeunes femmes obèses souhaitant préserver leur fertilité.

Prévention et détection précoce

Pour les jeunes femmes obèses présentant un cancer précoce ou une hyperplasie endométriale atypique (HEA), des alternatives à l’hystérectomie existent. Beaucoup souffrent d’anovulation, entraînant une stimulation excessive de l’endomètre par les œstrogènes.

Les options thérapeutiques incluent la progestine orale ou les DIU hormonaux. Les taux de réussite varient :

  • Progestine orale : 65,8 % de réponse complète dans l’HEA et 48,2 % dans le cancer
  • Taux de récidive : 23,2 % pour l’HEA et 35,4 % pour le cancer après progestine orale
  • DIU progestatifs : 91 % de réponse dans l’HEA et 54 % dans le cancer à 12 mois

Les tumeurs de haut grade ou invasives ne sont pas éligibles à un traitement conservateur et nécessitent une hystérectomie.

Les facteurs génétiques jouent aussi un rôle. Les femmes porteuses du syndrome de Lynch (mutations MLH1, MSH2, MSH6 ou PMS2) ont un risque à vie de 40 à 60 %, avec un diagnostic médian à 48 ans. Ce syndrome représente environ 3 % des cancers de l’endomètre et 9 % des cas avant 50 ans.

Disparités raciales

Des écarts raciaux significatifs sont observés dans le pronostic. Si l’incidence augmente globalement, elle progresse plus vite chez les femmes noires. Les données 1990-2017 indiquent :

  • Femmes blanches : +0,3 % par an (P<0,05)
  • Femmes noires : +2,3 % par an (P<0,05)
  • Toutes femmes : +0,5 % par an (P<0,05)

Ces disparités s’accentuent après ajustement pour les hystérectomies, plus fréquentes chez les femmes noires.

Le taux plus élevé de tumeurs non endométrioïdes agressives chez les femmes noires est particulièrement préoccupant. Même à stade précoce, les jeunes femmes noires ont un risque de décès supérieur de 24 % à celui des blanches.

Les causes sont multifactorielles : différences biologiques, accès aux soins, inégalités systémiques. Une action urgente est nécessaire.

Types de cancer de l’endomètre

On distingue deux types principaux de cancers endométriaux. Les carcinomes endométrioïdes (80 % des cas) proviennent souvent d’une HEA et sont hormonodépendants. Les tumeurs non endométrioïdes (20 %) incluent :

  • Le carcinome séreux (le plus fréquent)
  • Le carcinome à cellules claires
  • Le carcinosarcome

Ces derniers sont agressifs, indépendants des hormones, et surviennent surtout après la ménopause. Le carcinome séreux peut se disséminer précocement.

Les tumeurs endométrioïdes sont classées par grade FIGO :

  1. Grade 1 : moins de 6 % de composante solide
  2. Grade 2 : 6-50 % de composante solide
  3. Grade 3 : plus de 50 % de composante solide

Les grades 1-2 ont généralement un bon pronostic ; le grade 3 et les types non endométrioïdes sont de moins bon pronostic.

Classification moléculaire et tests

Le projet TCGA a identifié quatre sous-groupes moléculaires aux comportements distincts :

  1. Ultramuté : mutations POLE, forte charge mutationnelle, meilleure survie
  2. Hypermuté : instabilité microsatellitaire (IMS), taux de mutations élevé
  3. Faible nombre de copies : endométrioïdes stables
  4. Nombre élevé de copies : mutations TP53, faible charge mutationnelle (séreux surtout)

Cette classification montre que toutes les jeunes femmes obèses n’ont pas une maladie hormonodépendante bénigne. Certaines présentent des cancers pilotés par la voie WNT-β-caténine.

Certaines altérations génétiques influencent le pronostic :

  • TP53 : survie réduite
  • CTNNB1 : pronostic défavorable dans les endométrioïdes
  • POLE : survie prolongée
  • Déficit MMR : impact sur le pronostic et les traitements

Les tests moléculaires sont cruciaux, notamment pour dépister le syndrome de Lynch et adapter la prise en charge.

Traitement chirurgical et stadification

La chirurgie mini-invasive (laparoscopie ou robotique) avec évaluation des ganglions sentinelles est désormais standard. Deux essais randomisés ont montré :

  • Moins de complications postopératoires
  • Meilleure qualité de vie à court terme
  • Pronostic équivalent à long terme

L’évaluation ganglionnaire a aussi évolué. La technique du ganglion sentinelle réduit le risque de lymphœdème (précédemment >30 %) et comprend :

  1. Injection de vert d’indocyanine au col
  2. Repérage et ablation des ganglions sentinelles bilatéraux
  3. Lymphadénectomie si échec de repérage
  4. Analyse pathologique poussée

Cette méthode est précise : cartographie réussie dans 86 % des cas, taux de faux négatifs de 2,8 %. Même à haut risque, les résultats restent bons.

La stadification FIGO postopératoire guide les décisions thérapeutiques.

Implications pour les patientes

Le lien avec l’obésité (57 % des cas) souligne l’importance de la gestion du poids. Une augmentation de 5 unités d’IMC majore le risque de plus de 50 %.

Pour les jeunes femmes souhaitant préserver leur fertilité, les traitements par progestatifs offrent une alternative à l’hystérectomie, avec des taux de réussite de 54 à 91 %.

La classification moléculaire permet des traitements ciblés : immunothérapie pour les déficits MMR, thérapies spécifiques selon les mutations.

Les femmes noires et leurs soignants doivent être vigilants face aux symptômes, compte tenu des disparités d’incidence et de pronostic.

Limites des connaissances actuelles

Malgré les progrès, des questions persistent. Les causes des disparités raciales, notamment la prévalence des tumeurs agressives chez les femmes noires, ne sont pas élucidées.

L’intégration de la classification moléculaire en routine clinique reste limitée par le coût et la complexité. Des approches simplifiées sont à l’étude (essai PORTEC-4a), mais ne sont pas encore standard.

Des recherches supplémentaires sont nécessaires, notamment sur l’hétérogénéité génomique du carcinome à cellules claires.

Conseils aux patientes

Il est recommandé de :

  1. Maintenir un poids santé, l’obésité étant le principal facteur modifiable
  2. Consulter en cas de symptômes (saignements anormaux)
  3. Envisager un conseil génétique en cas d’antécédents familiaux ou personnels de cancer précoce
  4. Discuter des options conservatrices si désir de fertilité
  5. Rechercher un avis spécialisé pour les techniques mini-invasives
  6. Être proactive sur les disparités raciales si concernée
  7. Se renseigner sur les tests moléculaires pour les maladies avancées ou récurrentes

La contraception orale réduit le risque de 30 à 40 %, avec une protection durable.

Sources

Titre : Endometrial Cancer
Auteurs : Karen H. Lu, M.D., et Russell R. Broaddus, M.D., Ph.D.
Publication : The New England Journal of Medicine
Date : 19 novembre 2020
Volume : 383;21
Pages : 2053-2064
DOI : 10.1056/NEJMra1514010

Cet article, adapté pour les patientes, s’appuie sur la publication originale et en conserve toutes les données significatives.