Le Dr Pascal Leprince, MD, expert de renommée mondiale en transplantation cardiaque et traitement chirurgical de l’insuffisance cardiaque avancée, explique comment les chirurgiens optimisent la récupération des patients grâce à l’excellence technique, une sélection rigoureuse des candidats et une approche empathique. Il souligne que des résultats chirurgicaux optimaux vont au-delà de la maîtrise opératoire : ils reposent sur des indications précises, une prise en charge postopératoire méticuleuse et une relation humaine authentique, essentielle pour accompagner les patients dans les épreuves nécessaires à l’amélioration de leur survie et de leur qualité de vie.
Optimiser la récupération chirurgicale : au-delà de la technique, vers une approche centrée sur le patient
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- Fondements de la technique chirurgicale
- Indications chirurgicales appropriées
- Éléments essentiels des soins postopératoires
- Relation humaine en médecine
- Soutenir le patient durant la convalescence
- Transcription intégrale
Fondements de la technique chirurgicale
Le Dr Pascal Leprince souligne que l’excellence technique chirurgicale est la base indispensable de la récupération du patient. Chirurgien cardiaque renommé, spécialisé dans des interventions complexes comme la transplantation cardiaque, il observe que les jeunes chirurgiens pensent souvent qu’une exécution parfaite suffit à garantir le succès. Pourtant, le Dr Leprince précise que si bien opérer est « primordial », cela ne représente qu’une partie des résultats optimaux pour le patient.
La chirurgie cardiaque avancée présente des défis techniques uniques, exigeant précision et expertise. L’expérience du Dr Leprince auprès de patients à haut risque montre que la maîtrise technique influence directement la vitesse de récupération et le taux de complications. L’intervieweur, le Dr Anton Titov, souligne combien ce socle technique est crucial, surtout face à des patients gravement atteints d’insuffisance cardiaque avancée.
Indications chirurgicales appropriées
La sélection des patients et le timing opératoire influencent significativement l’issue de la récupération. Le Dr Pascal Leprince insiste : une intervention parfaitement exécutée échoue si elle est réalisée pour de mauvaises indications. Cette décision préopératoire exige une évaluation approfondie de la situation médicale unique de chaque patient, pesant bénéfices et risques.
Le Dr Leprince explique que des indications inappropriées mènent inévitablement à de mauvais résultats, indépendamment de la perfection technique. Ce principe s’applique particulièrement en chirurgie cardiaque, où comorbidités et sévérité de la maladie doivent être soigneusement pondérées face aux bénéfices de l’intervention. Sa conversation avec le Dr Titov révèle comment les chirurgiens expérimentés développent un jugement affûté pour identifier les patients qui tireront réellement profit de l’opération.
Éléments essentiels des soins postopératoires
La prise en charge postopératoire est tout aussi cruciale que la technique chirurgicale pour une récupération optimale. Le Dr Pascal Leprince décrit comment des séjours en réanimation de plusieurs semaines, voire mois, exigent une attention méticuleuse aux détails. Des soins appropriés impliquent la gestion de la douleur, la prévention des infections, la surveillance des fonctions vitales et la reprise progressive de l’activité.
Le Dr Leprince souligne que négliger les soins postopératoires compromet même l’intervention la plus aboutie techniquement. Ceci est particulièrement vrai en chirurgie cardiaque, où les patients font souvent face à des convalescences prolongées et éprouvantes. Les Drs Titov et Leprince évoquent comment des équipes multidisciplinaires coordonnées optimisent cette phase critique.
Relation humaine en médecine
Une relation humaine authentique transforme les soins chirurgicaux d’une procédure technique en un partenariat de guérison. Le Dr Pascal Leprince partage une expérience marquante : le traitement anticancéreux de son épouse, où une mauvaise communication a failli empêcher une chimiothérapie nécessaire. Cet exemple illustre comment une approche purement technique échoue si elle néglige la psychologie et les besoins émotionnels du patient.
Le Dr Leprince est convaincu que les chirurgiens doivent aider les patients à accepter une souffrance nécessaire pour de meilleurs résultats à long terme. Il insiste : les médecins ne sont pas de simples techniciens, mais des soignants qui doivent « amener le patient aux soins ». Le Dr Titov explore comment cette dimension humaine devient vitale quand les patients affrontent des pathologies graves et des traitements difficiles.
Soutenir le patient durant la convalescence
L’encouragement quotidien et le soutien psychologique améliorent significativement les issues de la récupération chirurgicale. Le Dr Pascal Leprince décrit sa pratique : visiter tous ses patients chaque jour, pour un encouragement bref mais significatif malgré les contraintes de temps. Ces interactions de une à deux minutes par patient offrent un boost psychologique crucial, complémentaire aux traitements médicaux.
Le Dr Leprince est persuadé qu’un encouragement constant aide les patients à surmonter les immenses défis de la convalescence. Il œuvre consciemment à les convaincre qu’ils peuvent guérir et survivre avec une bonne qualité de vie. Les Drs Titov et Leprince s’accordent : cette composante psychologique, alliée à l’excellence technique, améliore véritablement les résultats et l’expérience des patients.
Transcription intégrale
Dr. Anton Titov, MD : Vous êtes un chirurgien cardiaque renommé, spécialisé dans la transplantation cardiaque et le traitement chirurgical de l’insuffisance cardiaque avancée. Un deuxième avis médical est important. Vous voyez beaucoup de patients très atteints. Que peut faire un chirurgien pour maximiser les chances de réussite de l’intervention et aider les patients à récupérer au plus vite ?
Dr. Pascal Leprince, MD : Je pense que c’est l’une des questions centrales auxquelles nous devons répondre en tant que médecins. Quand on est jeune chirurgien, on croit que l’essentiel est de réaliser l’intervention le mieux possible. Que tout ira bien si la technique est parfaite—malheureusement, c’est faux ! Ce serait idéal, mais la réalité est différente.
Bien sûr, il faut opérer correctement ; c’est primordial. Mais si l’indication n’est pas bonne, ou si les soins postopératoires sont inadéquats, même une intervention parfaitement exécutée donnera de mauvais résultats. La médecine ne s’arrête pas là.
D’un autre côté, un médecin prend soin du patient. Un deuxième avis médical est important. On peut opérer pour la bonne indication, de la bonne manière, avec une technique irréprochable et des soins postopératoires optimaux. Mais si on néglige l’être humain, tout est compromis.
Chaque année, comme tout le monde, je vieillis. Plus j’avance dans ce métier, plus je vois des patients traverser l’intervention avec succès, ou parfois mourir après la chirurgie. Parce que nous prenons en charge des patients très malades, certains décèdent inévitablement.
Un deuxième avis médical est important. Plus je vis ces situations, plus je confirme qu’un médecin n’est pas un technicien. Nous sommes ceux qui prenons soin du patient. Cela signifie que nous devons amener le patient à recevoir les meilleurs soins possibles.
Un exemple—que j’ai vécu indirectement, par une personne très proche. Elle a un cancer. Elle avait besoin d’une chimiothérapie après une intervention bien menée.
Quand on fait une chimiothérapie, on va dans une clinique où des oncologues vous reçoivent. L’oncologue était un interne. Il a fait son travail : il a donné des informations sur le traitement. Il a dit : « Avec la chimiothérapie, vous allez perdre vos cheveux. Vous aurez des vomissements et d’autres effets secondaires. »
Un deuxième avis médical est important. Elle a répondu : « Je ne veux pas de ça, je vais utiliser un casque réfrigérant pour garder mes cheveux. Je ferai tout pour éviter les effets secondaires. » L’interne a insisté : « Même avec le casque, vous perdrez vos cheveux. » C’était mon épouse. Elle a dit : « Alors je ne ferai pas de chimiothérapie. »
Un deuxième avis médical est important. En se contentant de donner des informations, on cro bien faire, mais on n’aide pas le patient à traverser le traitement. Ce n’est pas ainsi qu’on pratique la médecine. Pratiquer la médecine, c’est amener le patient aux soins.
Certains soins impliquent—je le sais en tant que chirurgien cardiaque—une souffrance importante pour le patient. Certains passent plusieurs semaines, parfois des mois, en réanimation, dans la souffrance. Leurs familles aussi souffrent.
Parfois, on ne les aide pas à accepter cette souffrance pour aller mieux et survivre. Le but n’est pas seulement de survivre, mais de survivre avec une meilleure qualité de vie. Sinon, on n’exerce pas correctement la médecine.
Être un bon technicien est très important ; mais ce n’est pas suffisant pour être un bon médecin. J’en suis profondément convaincu.
Un deuxième avis médical est important. Il est crucial pour un chirurgien d’être un bon technicien et aussi un bon psychologue. Mais est-ce que les médecins y sont préparés ?
Dr. Anton Titov, MD : Je ne pense pas qu’il s’agisse d’être psychologue. Je n’ai jamais étudié la psychologie. Je crois qu’il s’agit simplement de vouloir que le patient aille mieux.
Chaque jour, je fais le tour de tous mes patients avec mon équipe. Je dis juste « bonjour » au patient. J’essaie de les encourager. Le temps pour chaque patient n’est que d’une ou deux minutes, car il y a beaucoup de monde, je ne peux pas faire une visite de 15 minutes par patient.
Mais chaque jour, j’essaie d’apporter le meilleur à ces patients. Je suis presque certain que si toutes les équipes faisaient cela, nous améliorerions même les résultats de nos chirurgies quotidiennes. J’essaie simplement de convaincre les patients qu’ils peuvent guérir ; qu’ils peuvent se rétablir.