Le Dr Randy Cron, MD, expert de renommée mondiale en rhumatologie pédiatrique et syndromes de tempête cytokinique, éclaire les facteurs de susceptibilité du syndrome inflammatoire multisystémique chez l’enfant (MIS-C). Il révèle la découverte surprenante selon laquelle les enfants auparavant en bonne santé présentent un risque accru. Le Dr Cron explore également les recherches génétiques émergentes qui associent des mutations uniques à la prédisposition au MIS-C. Enfin, il compare les profils de risque du COVID-19 sévère et du MIS-C au sein de la population pédiatrique.
Facteurs de risque et prédisposition génétique du MIS-C chez l’enfant
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- Aperçu de la prédisposition au MIS-C
- Contraste entre les risques de COVID et de MIS-C
- Facteurs génétiques dans le MIS-C
- Rôle des mutations des gènes de la LNH
- Recherche et orientations futures
- Transcription intégrale
Aperçu de la prédisposition au MIS-C
Le Dr Randy Cron aborde une question essentielle : pourquoi seule une minorité d’enfants développent un syndrome inflammatoire multisystémique après une infection au COVID-19. Il souligne qu’il s’agit d’un domaine de recherche actif en pédiatrie. Les facteurs sous-jacents de cette susceptibilité restent mal compris, et le Dr Cron insiste sur la nécessité d’études supplémentaires pour identifier les enfants les plus à risque de développer cette affection inflammatoire aiguë.
Contraste entre les risques de COVID et de MIS-C
Le Dr Cron met en lumière une différence marquée entre les profils de risque du COVID-19 sévère et du MIS-C chez l’enfant. Les enfants hospitalisés pour une pneumonie grave due au COVID-19 ou pour un syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) présentent souvent des comorbidités préexistantes, similaires à celles observées chez l’adulte : obésité, diabète, hypertension, maladies pulmonaires ou rénales chroniques.
En revanche, la grande majorité des enfants atteints de MIS-C étaient auparavant en bonne santé. Ils ne prenaient pas de traitement pour des affections chroniques et n’avaient pas d’antécédents médicaux sous-jacents. Cette opposition rend difficile l’identification de facteurs de risque clairs, comme le note le Dr Cron.
Facteurs génétiques dans le MIS-C
Les recherches génétiques émergentes apportent des éclairages sur la prédisposition au MIS-C. Le Dr Cron présente des travaux menés avec des collègues de New York sur une cohorte d’enfants suivis dès le début de la pandémie. Leur étude s’est concentrée sur des gènes connus comme facteurs de risque du syndrome d’activation macrophagique, un trouble sévère de tempête cytokinique.
Les premiers résultats de cette analyse génétique sont significatifs. Ils suggèrent une composante héréditaire pouvant prédisposer certains enfants à une réponse inflammatoire exagérée après le COVID-19. Ces recherches sont essentielles pour comprendre l’immunologie du MIS-C.
Rôle des mutations des gènes de la LNH
Une découverte clé concerne les mutations des gènes associés à la lymphohistiocytose hémophagocytaire (LNH). Le Dr Cron rapporte qu’environ un quart des enfants de la cohorte new-yorkaise atteints de MIS-C présentaient une mutation sur un seul allèle de ces gènes. Normalement, la LNH est une maladie autosomique récessive nécessitant deux copies mutées pour s’exprimer pleinement, survenant généralement en bas âge.
Le Dr Cron explique qu’une seule copie défectueuse de ces gènes pourrait augmenter modérément le risque de développer un syndrome de tempête cytokinique comme le MIS-C. Cette observation rejoint des constatations antérieures à la pandémie, selon lesquelles d’autres syndromes de tempête cytokinique peuvent aussi être influencés par des mutations sur un seul allèle. Il précise que cette prédisposition génétique diffère de la LNH classique.
Recherche et orientations futures
La recherche sur la prédisposition au MIS-C se poursuit et reste complexe. Le Dr Cron participe à la publication de données génétiques issues d’une cohorte d’environ 40 enfants. Il souligne qu’il est encore difficile de cerner l’ensemble des facteurs de risque génétiques.
Cette orientation de recherche est cruciale pour se préparer aux futures pandémies et comprendre les syndromes inflammatoires post-viraux. Les travaux du Dr Cron et de ses collègues contribuent à établir des bases pour identifier les enfants les plus vulnérables à des complications graves comme le MIS-C après une infection virale.
Transcription intégrale
Dr Anton Titov : Puisqu’une minorité d’enfants développent un syndrome inflammatoire multisystémique après le COVID-19, quels sont les facteurs de susceptibilité ? S’agit-il de génétique ? D’affections médicales préexistantes ? Qu’est-ce qui rend certains enfants si vulnérables à cette maladie d’apparition très aiguë ?
Dr Randy Cron : C’est une question que beaucoup d’entre nous aimerions résoudre, mais nous n’avons pas encore de réponse définitive. Contrairement au COVID, comme je l’ai mentionné, les enfants sont généralement épargnés par le COVID. Les raisons de cette relative protection font toujours l’objet de recherches.
Dr Randy Cron : Néanmoins, nous avons hospitalisé à peu près autant d’enfants pour une infection COVID elle-même que pour un MIS-C. Donc, même si c’est beaucoup plus rare que chez les adultes, les enfants sont tout de même touchés.
Dr Randy Cron : Ce qui est intéressant, c’est que, comme chez les adultes, les enfants hospitalisés pour une infection COVID active avec pneumonie sévère évoluant parfois vers un SDRA présentent souvent des comorbidités : obésité, diabète, hypertension, maladies pulmonaires ou rénales chroniques, exactement comme chez l’adulte. Le tableau est très similaire.
Dr Randy Cron : À l’inverse, pour le MIS-C, la grande majorité de ces enfants étaient auparavant en bonne santé. Ils ne prenaient pas de traitement chronique et n’avaient pas d’antécédents médicaux sous-jacents. Quelques-uns présentaient certaines de ces affections, mais globalement, très peu. Il s’agissait essentiellement d’enfants en bonne santé.
Dr Randy Cron : Il est donc difficile d’en dégager un facteur de risque, si ce n’est que l’absence de maladie chronique pourrait légèrement augmenter le risque par rapport à ceux qui en avaient. Peut-être, je ne sais pas.
Dr Randy Cron : Mais mes collègues de New York, avec lesquels j’ai collaboré, ont réalisé des études génétiques sur leur cohorte d’enfants suivis tôt dans la pandémie. Nous finalisons la publication de ces données.
Dr Randy Cron : Ils ont examiné des gènes que nous connaissons comme facteurs de risque du syndrome d’activation macrophagique, dont nous parlerons sans doute. Il s’avère qu’environ un quart des enfants diagnostiqués avec un MIS-C dans leur hôpital à New York au début de la pandémie présentaient une mutation sur un seul allèle de gènes qui, si les deux copies sont mutées, provoquent une LNH.
Dr Randy Cron : Il s’agit d’une tempête cytokinique sévère qui apparaît généralement dans les premiers jours, semaines ou mois de la vie. C’est une maladie autosomique récessive : les deux gènes doivent être mutés pour que la maladie se déclare, avec une pénétrance quasi totale, surtout tôt dans la vie.
Dr Randy Cron : La surprise, observée même avant la pandémie, est que d’autres formes de syndromes de tempête cytokinique peuvent impliquer des mutations sur un seul allèle. Normalement, on s’attend à ce que la copie saine compense la copie défectueuse. C’est le cas pour des maladies comme la mucoviscidose ou la drépanocytose, où une seule copie mutée ne suffit pas à déclencher la maladie.
Dr Randy Cron : Mais ici, une seule copie défectueuse peut légèrement augmenter le risque de développer une tempête cytokinique. Dans notre cohorte d’environ 40 enfants, en collaboration avec New York, cela suggère que certains de ces gènes pourraient être des facteurs de risque.
Dr Randy Cron : Mais il est encore trop tôt pour en être certain.