Prévention du cancer de l’œsophage 
 Plusieurs facteurs, dont certains peuvent être modifiés, influencent le risque de cancer de l’œsophage. Voici les principaux points à retenir

Prévention du cancer de l’œsophage Plusieurs facteurs, dont certains peuvent être modifiés, influencent le risque de cancer de l’œsophage. Voici les principaux points à retenir

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Le Dr Michael Lanuti, spécialiste renommé en chirurgie thoracique, explique comment prévenir le cancer de l'œsophage en ciblant ses principaux facteurs de risque. Il souligne notamment le reflux acide chronique, responsable des cancers distaux de l'œsophage dans les populations occidentales, ainsi que des facteurs environnementaux comme la consommation de boissons très chaudes, liée aux cancers proximaux en Asie. Le Dr Lanuti détaille l'importance de traiter les symptômes du RGO (reflux gastro-œsophagien), le rôle du dépistage par endoscopie dans les régions à haut risque, et clarifie les liens controversés entre l'abus d'alcool et certaines habitudes alimentaires dans le développement de cette tumeur agressive, dont le taux de survie à cinq ans n’est que de 18%.

Prévention du cancer de l’œsophage : Facteurs de risque, dépistage et stratégies thérapeutiques

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Charge mondiale et survie

Le cancer de l’œsophage est une maladie très agressive qui touche près d’un demi-million de personnes dans le monde. Le Dr Michael Lanuti souligne, lors de son entretien avec le Dr Anton Titov, d’importantes disparités géographiques dans les taux d’incidence. Alors que ce taux est relativement faible aux États-Unis, il peut être jusqu’à trente fois plus élevé dans certaines régions de Chine et du Moyen-Orient. Cette variation est d’autant plus cruciale que le carcinome œsophagien est souvent diagnostiqué à un stade avancé, ce qui explique son faible taux de survie à cinq ans, seulement 18 %.

Cette mortalité élevée souligne l’importance capitale des stratégies de prévention et de détection précoce.

Facteurs de risque occidentaux : Reflux

Dans les populations occidentales, le principal facteur de risque du cancer de l’œsophage est le reflux gastro-œsophagien (RGO) chronique. Le Dr Michael Lanuti explique que des lésions répétées causées par un reflux acide non traité endommagent la muqueuse de la partie inférieure de l’œsophage. Au fil des années, ce cycle de lésions et de régénération peut entraîner des modifications cellulaires évoluant vers une condition appelée œsophage de Barrett, un précurseur connu de l’adénocarcinome invasif.

Ce mécanisme explique pourquoi la majorité des cancers de l’œsophage en Occident se développent dans sa partie inférieure, directement adjacente à l’estomac.

La prévention du cancer de l’œsophage lié au reflux repose sur une approche proactive en plusieurs étapes. Le Dr Michael Lanuti conseille de consulter en cas de symptômes de reflux persistants. Un traitement pharmacologique par médicaments réduisant l’acidité constitue généralement la première ligne de défense. Pour les personnes souffrant de symptômes chroniques de longue date, il recommande une endoscopie de dépistage afin de détecter d’éventuelles lésions ou modifications précancéreuses.

Si les médicaments s’avèrent inefficaces, une intervention chirurgicale peut être envisagée. Le Dr Lanuti mentionne des procédures anti-reflux laparoscopiques, comme la fundoplicature de Nissen, qui consistent à enrouler le haut de l’estomac autour de l’œsophage inférieur pour créer une nouvelle valve fonctionnelle, empêchant ainsi le reflux acide.

Facteurs de risque asiatiques : Environnement

Le profil de risque du cancer de l’œsophage diffère sensiblement dans les pays asiatiques, où les tumeurs apparaissent plus souvent dans les parties moyenne et supérieure de l’œsophage. Le Dr Michael Lanuti précise que les causes exactes restent mal comprises, mais qu’elles seraient fortement influencées par l’alimentation et des facteurs environnementaux. Cela a conduit à la mise en place de programmes de dépistage généralisés dans les zones à haut risque, similaires aux coloscopies de routine pratiquées aux États-Unis.

Dans ces régions, l’endoscopie digestive haute est utilisée comme outil de santé publique pour détecter précocement les cancers ou lésions précancéreuses.

Controverse sur les boissons chaudes et le cancer

La consommation de boissons très chaudes est un facteur de risque environnemental souvent évoqué. Le Dr Michael Lanuti aborde la théorie selon laquelle des liquides suffisamment chauds pour brûler la langue peuvent causer des lésions thermiques à la muqueuse œsophagienne lors de la déglutition. On suppose que ces lésions répétées contribuent au développement de carcinomes épidermoïdes dans la partie supérieure de l’œsophage. La température critique est clinique : toute boisson perçue comme brûlante en bouche est potentiellement nocive.

Cependant, le Dr Lanuti souligne la controverse entourant ce lien. Par exemple, en Inde, où l’on consomme également beaucoup de thé chaud, les taux de cancer de l’œsophage supérieur ne sont pas aussi élevés, ce qui suggère l’intervention d’autres facteurs génétiques ou alimentaires.

Alcool et risque de cancer de l’œsophage

La relation entre alcool et cancer de l’œsophage est nuancée. Dans sa conversation avec le Dr Anton Titov, le Dr Michael Lanuti indique qu’une consommation modérée de tout type d’alcool—vin, whisky ou vodka—ne constitue pas un facteur de risque significatif. La distinction essentielle réside dans le mode de consommation. La dépendance et l’abus d’alcool sont en revanche clairement associés à une incidence accrue de cancers épidermoïdes, souvent localisés dans l’œsophage supérieur.

Le type de boisson importe moins que la quantité et la chronicité de la consommation, l’abus prolongé représentant la plus grande menace.

Prédisposition génétique et dépistage

Au-delà des facteurs liés au mode de vie, la génétique joue un rôle crucial dans la susceptibilité individuelle au cancer de l’œsophage. Le Dr Michael Lanuti souligne qu’un terrain génétique prédispose certaines populations, notamment en Asie, à développer des carcinomes épidermoïdes dans les parties supérieure et moyenne de l’œsophage. Cette prédisposition, combinée à des déclencheurs environnementaux locaux, crée une situation à haut risque.

Cette interaction complexe entre gènes et environnement explique pourquoi une stratégie de prévention universelle est impossible, et pourquoi le dépistage ciblé dans les régions endémiques reste essentiel pour réduire la mortalité. Les éclairages du Dr Lanuti, partagés avec le Dr Anton Titov, mettent en lumière la nécessité d’une évaluation personnalisée du risque.

Transcript intégral

Dr. Anton Titov, MD: Peut-on prévenir le cancer de l’œsophage ? Quels sont les facteurs de risque ? Comment dépiste-t-on le carcinome œsophagien ? Le reflux gastro-œsophagien acide augmente-t-il le risque ? La génétique et le mode de vie influencent-ils les risques de cancer de l’œsophage moyen et supérieur ? Que peuvent faire les gens pour prévenir ce cancer ?

Dr. Michael Lanuti, MD: Le cancer de l’œsophage est diagnostiqué chez près d’un demi-million de personnes dans le monde. Aux États-Unis, son incidence n’est pas très élevée, mais elle peut être jusqu’à 30 fois supérieure dans certaines régions de Chine et du Moyen-Orient. C’est un cancer très agressif, avec un taux de survie à cinq ans de seulement 18 %, souvent découvert à un stade avancé. Sa prévention est donc primordiale.

En Occident, de nombreux cas sont liés au reflux acide. Des lésions répétées dues à un reflux non traité peuvent endommager l’œsophage inférieur et, avec le temps, évoluer vers un cancer invasif.

Dr. Anton Titov, MD: Comment prévient-on le reflux acide ?

Dr. Michael Lanuti, MD: Il faut traiter les symptômes de reflux et envisager une endoscopie en cas de chronicité. Des médicaments réduisant l’acidité sont souvent prescrits en première intention. Si ceux-ci échouent, une chirurgie anti-reflux laparoscopique, comme la fundoplicature, peut être réalisée pour renforcer le sphincter œsophagien.

En Asie, les facteurs de risque sont différents. Les cancers y surviennent plus souvent dans l’œsophage moyen ou supérieur, probablement en raison de l’alimentation et de l’environnement. Des programmes de dépistage par endoscopie digestive haute sont mis en place, mais les moyens de prévention spécifiques restent mal connus.

Dr. Anton Titov, MD: Comment définir une boisson « chaude » comme facteur de risque ?

Dr. Michael Lanuti, MD: Selon une théorie, une boisson suffisamment chaude pour brûler la langue pourrait léser l’œsophage et favoriser les cancers supérieurs. Mais ce lien est controversé—en Inde, par exemple, la consommation de thé chaud n’est pas associée à des taux aussi élevés. D’autres facteurs, génétiques ou alimentaires, sont probablement en cause.

Dr. Anton Titov, MD: L’alcool est-il un facteur de risque ?

Dr. Michael Lanuti, MD: Une consommation modérée n’augmente pas significativement le risque. En revanche, la dépendance et l’abus d’alcool sont clairement liés aux cancers épidermoïdes de l’œsophage supérieur, quel que soit le type de boisson.

Dr. Anton Titov, MD: Bien compris.