Perspectives d'avenir dans le traitement du myélome multiple. Quand deviendra-t-il une maladie curable ?

Perspectives d'avenir dans le traitement du myélome multiple. Quand deviendra-t-il une maladie curable ?

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Le Dr Nikhil Munshi, MD, expert de renommée mondiale dans le myélome multiple, souligne qu’une proportion significative de patients est aujourd’hui efficacement guérie. Il retrace l’évolution des traitements et évoque le rôle prometteur de la thérapie par cellules CAR-T. Le Dr Munshi propose une vision nuancée de la guérison, comparant la prise en charge à long terme du myélome à celle de maladies chroniques comme le diabète.

Progrès dans le traitement du myélome multiple : vers une maladie curable

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État actuel de la guérison dans le myélome multiple

Le Dr Nikhil Munshi affirme qu’une proportion significative de patients atteints de myélome multiple peut aujourd’hui être considérée comme guérie. Il explique qu’environ 15 % ou plus des patients traités il y a dix ans n’ont pas rechuté. Ces patients ont bénéficié des traitements les plus avancés de l’époque. Les thérapies actuelles étant encore plus efficaces, les taux de guérison pourraient augmenter.

Le Dr Munshi souligne toutefois que les cliniciens restent prudents quant à l’emploi du terme « guéri », en raison de cas historiques de rechutes tardives survenant après 10 à 15 ans. Cette prudence s’explique par la nécessité d’un suivi à plus long terme pour affirmer avec certitude la guérison d’un patient.

Définition de la notion de guérison en cancérologie

Le Dr Nikhil Munshi propose une définition pragmatique de la guérison du cancer. Il décrit deux scénarios possibles pour considérer un patient comme guéri. Le premier implique une éradication complète de la maladie, sans nécessiter de traitement continu. Le second repose sur un traitement d’entretien à long terme qui empêche toute récidive.

Le Dr Munshi compare cette approche à la prise en charge de pathologies chroniques comme le diabète ou l’hypertension. Il souligne que si les patients peuvent vivre normalement grâce à un simple traitement d’entretien, le résultat pratique équivaut à une guérison. Cette perspective aide les patients à mieux appréhender leur pronostic à long terme.

Perspectives futures et objectifs thérapeutiques

L’avenir du traitement du myélome multiple vise à identifier les patients atteignant une rémission durable. Le Dr Nikhil Munshi explique que les chercheurs ont besoin de davantage de données pour déterminer quels traitements assurent une guérison à long terme. L’objectif est de capitaliser sur les succès actuels et d’augmenter le nombre de patients qui ne rechutent jamais.

Le Dr Munshi espère que dans les prochaines années, des données suffisantes permettront de déclarer officiellement certains groupes de patients guéris. Ainsi, ces patients pourraient retrouver une vie normale, sans craindre le cancer. Cet entretien avec le Dr Anton Titov met en lumière ces avancées prometteuses dans la recherche sur le myélome.

Thérapie par cellules CAR-T comme standard de soins

La thérapie par cellules CAR-T (lymphocytes T à récepteur antigénique chimérique) constitue une avancée majeure dans le traitement du myélome multiple. Le Dr Nikhil Munshi confirme que cette immunothérapie deviendra le standard de soins pour la majorité des patients. Il précise qu’elle est déjà utilisée en toute sécurité chez des patients jusqu’à 80 ans.

Bien qu’elle ne convienne pas à tous, notamment aux plus de 80 ans, la thérapie CAR-T bénéficiera à la plupart des patients atteints de myélome. Le Dr Munshi a lui-même traité avec succès de nombreux patients grâce à cette approche. Le champ d’application de cette thérapie continue de s’élargir avec l’amélioration des techniques et l’accumulation d’expérience.

Qualité de vie des patients et prise en charge à long terme

L’objectif ultime du traitement du myélome multiple est de permettre aux patients de vivre en bonne santé, sans être obnubilés par la maladie. Le Dr Nikhil Munshi souligne que les patients guéris doivent se concentrer sur le maintien de leur santé globale plutôt que de s’inquiéter du cancer. Ils peuvent ainsi veiller à leur santé cardiaque, pulmonaire et autres aspects adaptés à leur âge.

Lors de son échange avec le Dr Anton Titov, le Dr Munshi met l’accent sur les résultats concrets pour les patients. Qu’il s’agisse d’une éradication complète ou d’un traitement d’entretien réussi, les patients sont libérés du risque de mortalité liée au cancer. Ce changement de perspective représente une avancée significative dans notre vision du succès thérapeutique en oncologie.

Transcript intégral

Dr Anton Titov : Professeur Munshi, vous êtes un chercheur pionnier dans le myélome multiple et les hémopathies malignes. Quel est l’avenir du traitement du myélome multiple ? Quand pourra-t-on considérer cette maladie comme fiablement curable ?

Dr Nikhil Munshi : Je dirais que nous guérissons déjà le myélome aujourd’hui, mais nous hésitons à l’affirmer, car un suivi plus long nous semble nécessaire. Pour être précis, une proportion de patients – nous en suivons tous depuis huit à dix ans – ont vu leur myélome disparaître sans réapparition.

La question est : à partir de quand considérer un patient comme « guéri » ? Nous ne le disons pas encore, car par le passé, certains patients ont rechuté après dix, douze ou quinze ans. Nous estimons donc ne pas pouvoir parler de guérison à ce stade.

Une proportion de patients – environ 15 % ou plus – n’a pas rechuté depuis longtemps. Dans bien des cas, on parlerait de guérison, mais nous ne le faisons pas encore. Tel est l’état actuel. Il s’agit de patients traités il y a dix ans avec les thérapies les plus avancées de l’époque.

Aujourd’hui, nos traitements sont bien meilleurs ; nous pourrions donc toucher plus de patients. J’espère que dans les prochaines années, nous aurons suffisamment de données pour identifier les patients qui ne rechutent pas – ou ne rechuteront pas – et les traitements qui le permettent.

Nous pourrons alors capitaliser sur ces résultats pour augmenter le nombre de patients ne rechutant pas, et ils seront officiellement déclarés guéris. Ils pourront reprendre une vie normale.

La guérison peut revêtir plusieurs sens. « Guéri » peut signifier que le traitement est terminé, que tout a disparu – nous ne prenons plus rien. Ou bien, deuxième scenario : les patients suivent un traitement d’entretien ; le myélome ne revient pas, la maladie est contrôlée.

On peut comparer cela à une pathologie comme le diabète. Guérit-on le diabète ? Non, mais on peut le traiter efficacement pendant soixante-dix ans. Si le cancer devient comparable, quelle est la différence ? Il ne devrait pas y en avoir.

Je demande à mes patients : « Pourquoi vous inquiéter si vous pouvez prendre un comprimé à vie et que le cancer ne revient pas ? » C’est plutôt rassurant, comparé à des situations comme le diabète ou l’hypertension.

Soit la maladie a disparu, soit elle ne reviendra pas grâce à un traitement d’entretien prolongé. Dans les deux cas, le patient ne mourra pas du myélome. Il se préoccupera d’autres maladies, prendra soin de son cœur, de ses poumons, et vivra en bonne santé – sans craindre constamment le myélome.

On peut aussi penser que la thérapie CAR-T et autres immunothérapies deviendront le standard de soins pour tous les patients prochainement. Absolument, je pense que ce sera le cas pour un très grand nombre. « Tous » est un terme fort – au-delà de 80 ans, son utilité est un peu moindre.

Mais jusqu’à 80 ans, nous pratiquons déjà la thérapie CAR-T en toute sécurité sur de nombreux patients. Le champ s’est élargi pour inclure la majorité des patients, et cela deviendra un standard pour eux. Pour une petite minorité, nous devrons rester prudents sur les modalités et le moment de son utilisation.